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Histoire du Ragtime

Dernière mise à jour : 7 juin 2023

Ecouter Cool Rag: https://youtu.be/aL-3p2OAInU


La vraie musique populaire Américaine est-elle, comme le chante Ella Fitzgerald, le Ragtime ?


Bien qu’écrite en 1918, The real American Folk Song (is a Rag) de George et Ira Gershwin ne fut publiée et enregistrée qu’en 1959. Mais qu’est-ce que cela signifie exactement ?


Le terme Rag désigne tout simplement un morceau de Ragtime. A l’époque, les compositeurs de ce style ajoutaient souvent ce mot aux titres de leurs morceaux: Maple leaf Rag, Harlem Rag, Kansas City Rag, Mississippi Rag, Pastime Rag, Slow Rag, Original Rag…


On pense que l’origine du terme Ragtime est une contraction de Ragged-time, qui signifie temps hâché ou temps décousu, puisque la mélodie y est « découpée » en rythmes courts et syncopés. De plus, à l’époque, le fait de modifier le rythme d’une mélodie connue était déjà appelé aux Etats-Unis « to rag a melody ».


Ce style apparait d’abord dans la communauté Afro-américaine à la fin du 19ème siècle. On peut le considérer comme un mélange d’harmonies issues du Romantisme (accords à la main gauche) et de rythmes Africains (rythmes de la main droite). Il est également possible qu’à l’occasion de la Foire mondiale de Chicago en 1893, les Américains aient écouté diverses Coon Songs, violentes parodies racistes de la culture noire, le terme de Rag étant aussi utilisé pour nommer ces chansons.


D'abord joué dans les milieux populaires du Middle West (Missouri), le Ragtime se développe rapidement dans les grandes villes américaines (Saint-Louis, Kansas City, la Nouvelle-Orléans, Chicago puis New York). Sa popularité est telle qu'il se diffuse aussi en Europe où des compositeurs classiques l'étudient, comme le fait Claude Debussy avec sa pièce Golliwog's Cakewalk de 1908.


Le répertoire du Ragtime est essentiellement pianistique, bien que des compositeurs noirs (Scott Joplin) ou blancs (Igor Stravinski) l'aient adapté ou orchestré pour des ensembles de cuivres et de bois. Parfois, le piano cède sa place au Xylophone, à l'Accordéon et au Banjo, devenant ainsi une musique d'orchestre où se mélangent musiciens blancs et noirs. Plus récemment le style Ragtime a pu être transcrit à la Guitare notamment grâce au révérend Gary Davis aux Etats-Unis et à Marcel Dadi en France.


Dans les Ragtimes, une des caractéristiques de la mélodie à la main droite est la syncope. Elle désigne un rythme attaqué sur un temps faible ou une partie de temps et se prolongeant sur un temps fort ou une partie forte de temps. L’effet entendu est donc un décalage de l’accentuation habituelle dans une mesure à 2 ou 4 temps. La syncope peut par exemple être la valeur longue des 3 figures rythmiques suivantes : brève, longue et brève.


La syncope ou l’accentuation décalée existe dans la plupart des styles de musique mais dans le cas du Ragtime, il s’agit certainement d’un héritage des percussions utilisées dans les danses Africaines ou Afro-caribéennes, par exemple le Clapping Juba ou la danse « de plantation » appelée Cakewalk (le « pas du gâteau »). La caractéristique rythmique de ces danses, comme pour la Rumba Cubaine, est de découper ou d’accentuer de façon ternaire (toutes les 3 doubles croches par exemple) des groupes binaires (4+4 doubles croches). On l’entend très bien au début de Maple leaf Rag de Scott Joplin.


Quand à la main gauche (ou l’accompagnement), elle réalise ce qu’on appelle une « pompe », c'est-à-dire les basses sur les temps forts (1 et 3) et les accords sur les temps faibles (2 et 4). Notons que ce rythme régulier de noires (ou de croches selon que la notation soit en 4/4 ou 2/4) contraste fortement avec les rythmes décalés de la mélodie et donc les met en valeur. Ce type d’accompagnement est typique de la Marche militaire et peut rappeler celui du Banjo.

Quand à la forme du Ragtime (ses différentes parties), celle-ci est proche de la Valse Viennoise. On peut également supposer que la musique Country ait eu une influence sur la grille d’accord du Ragtime, notamment au début de la première partie. La plupart des Rags possèdent 4 parties de 16 mesures avec un ou plusieurs thèmes mélodiques. Avec le temps, la forme du Ragtime évoluera et il ne gardera plus que deux parties, il intégrera aussi les blue notes issues du Blues.


Bien que la plupart des Ragtimes ne fassent pas appel à l'improvisation et qu'ils n’utilisent pas le swing, les croches (ou double-croches) n’étant pas swinguées (lively) mais « droites » (straight), le Ragtime fut par la suite à son tour l’un des styles ayant joué un rôle dans l’apparition du Jazz, même si son influence fut moins importante que celle du Blues, le point commun entre Jazz et Ragtime se situant surtout dans la façon d'enchaîner les accords et d'utiliser leurs notes dans la mélodie.


Le Ragtime donnera en effet avec le Blues le style de piano de Harlem appelé Stride, utilisant des croches swinguées (avec des pianistes comme James P. Johnson, Fats Waller, Willie "the Lion" Smith...).


Historique:


De part sa localisation au centre des Etats-Unis, l’état du Missouri était sans doute destiné à devenir une zone d’échange commercial et culturel. Depuis le début du 19ème siècle, Saint Louis servait en effet de point central entre le nord et le sud des Etats-Unis grâce au Mississippi, mais aussi entre l’est et l’ouest.


C’est pourquoi, à partir des années 1880, hommes d’affaires et petits entrepreneurs commencèrent à investir dans la région. L’un d’entre eux, John Turpin, originaire de Géorgie, ouvrit un saloon à Saint-Louis en 1887 (The silver dollar).


Son fils Tom fit de même et ouvrit à son tour son propre saloon en 1897. Tom Turpin (1871-1922) était aussi un pianiste autodidacte et la même année, il publiait sa première composition Harlem Rag. La forme de ce morceau devint un modèle pour les autres compositeurs de Ragtime. Ce fut aussi en 1897 que William Krell (1868-1933) publia son Mississippi Rag.


En 1900, Tom Turpin ouvrit à Saint-Louis un 2ème saloon, le célèbre Rosebud, où l’on pouvait écouter des pianistes comme Artie Matthews, Joe Jordan, Louis Chauvin (style "St Louis")… C’est ainsi que la ville de Saint-Louis devint la capitale du Ragtime.

John Stark, vétéran de la guerre de Sécession et grand mélomane, s’était installé dans la région en 1886. Il décida d’ouvrir un magasin de musique et finalement d’éditer et de publier des partitions.


En 1899, Scott Joplin (1867-1917), devenu de nos jours le plus célèbre des compositeurs de Ragtime, franchit les portes du magasin de John pour lui jouer Maple leaf Rag, aujourd’hui certainement le Ragtime le plus connu. Il refuse d’abord de publier cette pièce « très musicale mais trop difficile à jouer ». Finalement, le fils de John réussit à convaincre son père d’éditer Maple leaf, assurant ainsi l’immortalité au style du Ragtime (et des revenus confortables aux 2 parties!). C’est ainsi qu’en 1914, on estime le nombre de partitions vendues de Maple leaf Rag à plusieurs centaines de milliers, et le nombre de Ragtimes publiés par John à une cinquantaine.


Parmi les autres compositeurs de Ragtime, on peut citer: James Scott (1885-1938) et Joseph Lamb (1887-1960) tous 2 aidés par Scott Joplin, Jelly Roll Morton (style "New Orleans"), Charles Hunter, Charles L. Johnson…


et aussi plus récemment: Christopher Norton, Claude Bolling...

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